
À Douarnenez, en Bretagne, un groupe d’hommes et de femmes a monté une foncière agricole : « Kazel-ha-kazel », ce qui signifie « bras dessus, bras dessous » en breton. Ces habitant.e.s veulent mobiliser l’épargne citoyenne pour acheter collectivement des terres et y installer des paysans et des paysannes qui pratiquent une agriculture protectrice de l’eau, des sols et de la biodiversité. Il faut dire que la baie de Douarnenez est un territoire où les dégâts de l’agriculture intensive sont très visibles, notamment en raison de la prolifération des algues vertes. Le projet a été lancé il y a trois ans. Des citoyens et citoyennes y ont déjà investi 45 000 euros. Il leur faut atteindre 100 000 euros d’ici décembre 2025.
« La terre est un bien commun »
Muriel Corre est l’une des femmes impliquées dans ce projet. Cette retraitée des Affaires maritimes a commencé par se rendre à des réunions sur le thème de l’alimentation organisées par Douarnenez Communauté, la communauté de communes. Puis, de fil en aiguille, elle s’est aperçue qu’il fallait que les citoyens s’emparent eux-mêmes de la question. Elle s’est retroussé les manches et a participé à la création de la SCIC-SAS (Société coopérative d’intérêt collectif sous forme de société par actions simplifiée).
Et ça marche !
Ils ont déjà récolté plus de 45 000 euros et visent les 100 000 euros d’ici décembre 2025 pour acheter leurs premières terres : 16 hectares au Juch, pour aider à l’installation de trois paysans et paysannes qui reprennent une ferme avec un objectif de conversion en bio. Les trois porteurs du projet, Louise, Romain et Jules n’ont pas les moyens d’acheter. Et d’ailleurs, ils ne le veulent pas. Pour eux, comme pour Muriel, « la terre est un bien commun ». Ils louent donc 70 hectares dont 16 auront été acquis par la foncière.
« Éviter que toutes les terres ne soient avalées par l’agriculture intensive »
« Qui va nous nourrir sainement demain si on laisse toutes les terres être rachetées par les sociétés d’investissement ou rachetées par les plus grosses structures de l’agro-industrie ? » s’interroge Muriel. « Ce qu’on appelle les intrants, notamment les pesticides et l’azote sont nocifs pour la terre et pour notre santé. Mais concrètement, alors qu’une majorité d’agriculteurs arrive à l’âge de la retraite, la transmission des terres aux jeunes qui voudraient pratiquer une agriculture plus respectueuse du vivant est très difficile sans l’aide des citoyens. C’est un principe de réalité. Alors, on s’est retroussé les manches. » Ils ont pris contact avec Terre de Liens , le mouvement qui fait pousser des fermes bios un peu partout en France, mais ont souhaité garder une gouvernance locale. Ils se sont ensuite rapprochés de Terres d’Ici, une autre foncière citoyenne en Ille-et-Vilaine, un peu plus à l’est de la Bretagne. Ils ont passé une soirée à refaire le monde et à parler d’aspects très concrets. Et ils se sont lancés.

« La part est à 100 euros »
Le premier projet est lancé. Il s’agit d’une ferme en conversion bio avec 40 vaches jersiaises nourries à l’herbe, 30 bœufs à l’engraissement dans un système pâturant
intensif, 7 ha de légumes de conservation de plein champ. Les paysans sont expérimentés. Louise Bergès et Romain Barret ont suivi des études agricoles et ont travaillé 3 ans et demi dans le sud de la France où ils ont monté un atelier «légumes» au sein d’une ferme de 55 ha.
Jules Hermelin est titulaire d’un BTS agricole et a été salarié en élevage laitier pendant plusieurs années.
Il s’agit maintenant pour Kazel-ha-kazel de réunir 100 000 euros d’ici décembre 2025. Qu’on se le dise, la part est à 100 euros. Mais 1000, 5000, 10 000, c’est mieux.
Si vous voulez les soutenir www.kazel-ha-kazel.org kazel-ha-kazel@gozmail.bzh
Valérie Le Nigen, 7 août 2025